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Posté (modifié)

Pour la Joie….

 

 

Bien des Lunes ont tourné autour de ma maison, depuis trois ans. Combien? Je ne les ai pas comptées. Le temps a passé…

Et ce soir de la semaine dernière, j’ai eu envie de me remplir de la force, de la joie qui tombe des étoiles.

C’est ainsi qu’au premiers jours de la nouvelle Lune, je me suis rendu sur ma prairie du col de Faou, entre Vercors et Belledonne, mille mètres plus haut que la mer. La chaleur, l’envie soudaine, je n’ai emporté que les jumelles. La peur aussi d’avoir tout oublié, certainement.

Mais pourquoi regardons nous, admirons nous – je n’aime pas le mot observer, oui pourquoi regardons nous les étoiles ?

En ce qui me concerne je l’ai compris depuis longtemps. J’ai besoin de me sentir, dans mon esprit, dans mon cœur mais plus encore : dans ma chair, faire partie de Tout Cela, et de me remplir de la vie qui nous baigne à notre insu. Et qui nous anime, au sens vrai du mot.

 

Quelle étrange sensation que se retrouver allongé dans l’herbe dans la nuit dans le silence dans la paix, et regarder le ciel tourner lentement d’Est en Ouest ! Toutes ces lumières, ces cailloux célestes qui appellent nos désirs secrets, ces scintillements improbables mais bien réels, de l’Univers.

Alors passe la nuit, elle tourne et nous emporte dans sa valse éternelle, pour un instant, même pas une vie mais un instant d’une vie.

22h.

Je retrouve les senteurs amicales, je retrouve les bestioles insolentes qui me marchent dessus, je retrouve les tintinnabulements des cloches des vaches dans le lointain –Mahler, tu es ici aussi, Grand Musicien !

Je me prépare lentement à accueillir la force, à m’en remplir, à satiété.

23h.

Allongé dans l’herbe, je retrouve le vieux compagnon, le Triangle d’été ; à voix basse, lentement comme pour respecter l’éternité, j’en énumère les noms : Deneb, Véga, Altaïr. Sadr...des noms aux multiples origines, de multiples cultures, arrivés jusqu’à nous après 3500 ans d’histoire.

Je pointe les jumelles vers la Lyre, revoilà le diamant Véga, et la double que je sais double-double.

L’instrument est complet, en bas à gauche la belle double encore.

M57 tu es précisément ici, je te regarde mais ne te vois pas. Ainsi vient le besoin de téléscope, je m’en souviens maintenant…

Au Sud de Véga je cherche la belle carbonée, les souvenirs reviennent comme d’un tiroir qu’on ouvre et révèle ses trésors cachés : Véga -5’ -2° !

Mais bien sûr je ne te vois pas ! Ce n’est pas grave, je sais que tu es là, la certitude de la présence vaut la présence.

Et je pars dans le Cygne, depuis Deneb, je parcours le fleuve étoilé et tombe tout soudain sur le Cintre ! Oh que tu es beau, perdu dans ce champ de 5° !

Je m’attarde ainsi lentement sur les invisibles merveilles, les Dentelles, la nébuleuse verte là-bas vers l’Est…

Je retrouve avec délice et amusement les petites constellations, dites mineures, le Dauphin, la Flèche.

Je pose les jumelles, déjà le Triangle a tourné.

Minuit.

Deux étoiles filantes traversent le ciel -vite j’exprime mon souhait. Mais chut… la nuit est à la confidence, la nuit est à l’avenir.

Hercules.

Oh le puissant torse ! Et hop, dans les jumelles apparaît M13 le magnifique. Le plus beau c’est incontestable, paré de sa géante orange et de sa galaxie lointaine… comme les distances sont aplanies par le regard attentif !

Je cherche la nébuleuse que je sais être au Nord, à deux fois la distance bla bla … elle est là, mais je ne la vois pas !

Je m'amuse d'Ophiuchus, sur lequel Hercules pose son pied!

 

La fraîcheur me réveille soudain, je me suis endormi !

Le ciel a tourné de 30° environ, il doit être pas loin de 2h maintenant.

Alors je me lève, me dresse vers le ciel et accomplis un lent, très lent tour complet sur moi-même et parcours ainsi Cassiopée, je me remémore la Rose de Caroline et les multiples doubles rouges et bleues, puis Céphée et sa petite maison, puis les Ourses et le Dragon lové entre elles – je me souviens de tout!

Le rire me prend je reconnais le serpent, je devine là bas le Sagittaire et sa fumée de nébuleuses diffuses, mais que vient-il à l’Est ? Je ne me souviens plus, je tourne encore et encore, joyeux heureux comblé.

Je m’allonge à nouveau et fouille aux jumelles l’absence de nuit, car elle est bien là, la lumière, la vie qui tombe des étoiles, et je m’en saoûle et je la sens qui se répand en moi et me remplit et me lave des fatigues passées.

Mais que c’est étrange, en cet endroit protégé des hommes, l’aube déjà éclaircit le Levant ?

Oui, c’est bien cela, il est 3h passées ! Oh à peine je la devine, mais c’est certain, la voûte céleste a tourné et m’a emporté dans son sillage.

Et j’ai trouvé ce que j’étais venu chercher : la vie, le souffle, la force.

Je comprends maintenant pourquoi je suis venu ici cette nuit.

La nouvelle Lune, qui marque le début de ramadan ; Tu es allée le passer en famille, dans ton pays déchiré, écartelée entre le désir d’être tous les deux et la fidélité familiale. J’ai bien compris, tu as su me le dire.

Mais sais tu, le ciel ici est le même qui tourne au-dessus de toi, là-bas. Je voulais être près de Toi.

Très bientôt tu vas revenir, tu as eu la détermination de choisir, et je te dois de partager avec Toi la force et la joie que ton Dieu nous offre.

Très bientôt nous reviendrons ici même, ensemble, Toi et moi.

Nhebek.

Modifié par GéGé
Posté

Bonjour Gégé,

 

Retour à la source, la voûte céleste et ses merveilles ! ;)

Et surtout heureux d'avoir de tes nouvelles Gégé, la passion est toujours là, personne ne peut en douter. :)

 

Albéric

Posté

:) bonjour vous!

 

Oh ben, quel accueil, merci! Merci pour votre chaleur, merci de me dire coucou!

 

... maintenant je vais vérifier le Noble Tuyau, parce que demain j'ai organisé une soirée parents-enfants avec notamment mon Titi, quelque part dans les Alpes (je ne sais pas où ça se trouve!).

 

Bises à tous!

Posté

Quelle poésie !

 

samedi dernier j'ai dormi à la belle, de retour à la Maison, après 2 ans d'absence, dans les Ecrins. Comme toi, sans instrument, juste avec les yeux et les jumelles, j'ai assisté au lent défilé des Etoiles entre les sommets, au déploiement des ailes du Grand Cygne dans la Voie Lactée, avec la tâche en forme d'Amérique près de sa queue ...Magique !

Posté

Très joli et poétique, avec un ton mélancolique qu'on ne trouve pas si souvent dans les CROAs. On sent un sacré amour de l'astronomie, et j'adore à ce titre cette manière de ne pas voir les objets, mais de savoir qu'ils sont là et, d'une manière paradoxale, de les admirer.

 

Seule la dernière partie m'a paru faire un peu trop partie de la sphère privée pour nécessiter d'être partagée. Mais sinon, ce fut un très bon moment de lecture !

Posté

Ohhhhh un come back de l'ami GéGé :banana: et dire que j'ai failli rater ça :(

 

Pour la joie!

C'est aussi pour notre joie de te voir de retour chez les croateurs :p

 

 

Quelle étrange sensation que se retrouver allongé dans l’herbe dans la nuit dans le silence dans la paix, et regarder le ciel tourner lentement d’Est en Ouest ! Toutes ces lumières, ces cailloux célestes qui appellent nos désirs secrets, ces scintillements improbables mais bien réels, de l’Univers.

Je te vois comme si j'y étais, paisible et si humble devant ton ciel alpin :-_-:

 

La fraîcheur me réveille soudain, je me suis endormi !

No comment :D

 

La nouvelle Lune, qui marque le début de ramadan ; Tu es allée le passer en famille, dans ton pays déchiré, écartelée entre le désir d’être tous les deux et la fidélité familiale. J’ai bien compris, tu as su me le dire.

Mais sais tu, le ciel ici est le même qui tourne au-dessus de toi, là-bas. Je voulais être près de Toi.

Très bientôt tu vas revenir, tu as eu la détermination de choisir, et je te dois de partager avec Toi la force et la joie que ton Dieu nous offre.

Très bientôt nous reviendrons ici même, ensemble, Toi et moi.

Nhebek.

Ahhhhh GéGé quelle chance elle a ta p'tite princesse de t'avoir rencontré :wub:

 

Merci et au plaisir de te recroiser une nuit sous les étoiles :)

Posté

Quel beau récit Gégé.

 

En attendant, tu ne viendrais pas passer quelques nuitées par ici?

 

Cela me faire tellement plaisir d'évoquer le Maghreb avec toi.

 

Tiens, un petit croissant de fin de Ramadan d'il n'y a pas si longtemps, une Lune parmi celles que tu n'as plus comptées.

 

IMG_4934.JPG

 

Une cadeau de la voir: sachant qu'elle était là, mais cachée derrière les nuages, j'avais failli la laisser filer. Mais ce n'est pas important finalement...

 

Patte.

Posté

Magnifique...

Que de poésie et de sensation...

J'imagine tout à fait la solitude qui précède l'apparition enchantée des astres connus et l'envie d'aller à leur rencontre, de les nommer à voix haute et de respecter leur silence.

Un plaisir à lire. :)

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