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Le dobson désinvolte (5) : L’heure de prendre le thé


Jeff Hawke

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Repérage

 

Le Sagittaire : Pauvre de moi, qui vous signalait dans le précédent DD (« vers le ciel d’été ») que non, décidément, 12 objets de Messier dans une seule balade, c’était trop pour une contemplation sereine et bienheureuse, attentionnée et précise…Voilà que je vous propose maintenant de nous aventurer dans la constellation du Sagittaire, et que ce diabolique archer (qui est plus ou moins un centaure de surcroît…) abrite à lui seul 15 (quinze !) créatures messierines… Vous l’aurez compris, même si ce post va essayer de présenter la localisation et l’identification des 15 vedettes, le conseil est ne pas se les faire en totalité sur une seule nuit d’observation. Il faut segmenter l’affaire, le Nord puis le Sud par exemple, ou l’Est et l’Ouest, les globulaires puis les ouverts, comme vous le sentez. Revenir plusieurs fois sur ce Sagittaire pour l’apprécier calmement, comme on savoure une bonne tasse de thé… ça tombe bien d’ailleurs, cette constellation est essentiellement composée d’un astérisme que les anglo-saxons, toujours très concrets, appellent le Teapot, la théière…

 

Bon, elle est où cette théière ?

 

Première possibilité, par le toboggan Sud Ouest qui vient de l’Aigle, déjà évoqué dans ces colonnes. Il nous avait emmenés jusqu’à M16 et M17. Au Sud de M17, on va dire à une douzaine de degrés, on a la pointe du couvercle, Kaus Borealis. Ce couvercle est un triangle, posé sur un trapèze, le bec verseur à l’Ouest, c’est aussi un triangle, et l’anse à l’Est, encore un trapèze. Vous l’avez. Un magnifique teapot en porcelaine stellaire. L’étoile la plus au Sud, le bas du bec verseur, c’est Kaus Australis. Logique, non ? Et entre les deux, l’extrémité supérieure Ouest du récipient a pour nom Kaus Media. Nous verrons les noms des autres en nous promenant à la recherche des messiers.

 

Deuxième possibilité pour le trouver, en regardant à l’Est de la queue du Scorpion. Le Scorpion ? Oui, tellement facile à trouver, avec Antares, la rouge étoile qui s’affronte éthymologiquement à Mars ,… Bon, on verra le venimeux Scorpion plus tard, là c’était pour ceux qui connaissaient déjà (il est connu, le Scorpion) pour trouver facilement le Sagittaire (Lui est moins connu. En tout cas moi je ne le connaissais pas avant mon encore récente chute dans l’astro, tandis que le Scorpion, il me semble le connaître depuis tout petit…).

 

Bon, maintenant on attache les ceintures, jumelles au poing, dobson aux aguets, on y va…

 

Le Nord

 

Juste sur Kaus Borealis à un degré Nord Ouest, M28, un petit globulaire. Et au Nord Est, un petit peu plus loin, un autre, M22.En alignant l’extrémité supérieure de l’anse (Nunki) avec la Kaus nordique, une longueur, boum, voilà M8, la nébuleuse de la Lagune, avec en prime un amas d’étoiles pris dans la nébulosité, NGC6530 (Dieu du ciel ! Des NGC maintenant…Folie je vous dis…C’est trop.). A partir de M8, l’Ascension ! Une glorieuse remontée vers le Nord va nous amener successivement sur M20 (la nébuleuse Trifide), M21, un amas ouvert, M23, un autre amas ouvert (il faut s’incurver très légèrement vers l’Ouest en remontant depuis M21). Environ 5 degrés à l’Ouest de M23, on trouve M22, qu’il peut être plus aisé de localiser par un alignement Kaus Australis – Kaus Media, sur une longueur et demi, amenant sur l’étoile Mu qui est le sommet Ouest d’un losange. Un peu au-dessus du sommet Nord, il y a une petite figure d’étoiles (les Américains y voient un « kite », un cerf-volant) ennébulée dans M24. M24 est un objet fantastique, je ne m’y étendrai pas car ce n’est pas l’objet de ces posts de repérages et de balades, mais pensez qu’il s’agit d’une sorte de fenêtre sur un bras intérieur de notre galaxie, une déchirure dans la masse de gaz sombres qui nous masquent les régions centrales de la Voie Lactée. Rien que ce nuage seul mérite sans doute plusieurs nuits. Il y a un NGC (6603) dedans. On a un amas ouvert, M25, juste au Sud de l’étoile Est du losange dont Mu est le sommet Ouest. Et au Nord de M24, M18 un autre amas ouvert, et au-dessus de M18, voilà M17, la nébuleuse Omega… On la connaît celle-là ! M17 et M18 s’appuient sur le côté Est d’un petit triangle, ça peut aider.

 

Voilà, nous venons de terminer notre mise en coupe réglée du gisement Nord. Une pause est méritée…

 

Astérismes et constellations

 

Il est parfois question de la Grande Ourse, que les américains nomment Ursa Major (ils sont cultivés ces ricains…), mais qu’ils désignent souvent, par métonymie, du nom de l’astérisme principal qui compose la constellation : the Big Dipper, la Grande Casserole. Nous n’avons pas cette rigueur et confondons fréquemment l’astérisme et la constellation. On retrouve le même déplorable relâchement sémantique avec le Sagittaire que nous confondons allégrement avec l’astérisme Teapot, dont il est question dans ces pages. Un astérisme est une figure fortuite d’étoiles, une constellation étant un étendu et complexe arrangement symbolique d’étoiles, et par extension, une zone du ciel (un peu arbitraire, comme nos frontières terriennes qui font bien rigoler les oiseaux migrateurs et les rayonnements radioactifs). J’ai longtemps cru que le Hibou (NGC457) était un astérisme, alors que c’est un amas. Par contre, M73 est un astérisme, et il me semble avoir lu un jour quelque part, dans quelque louche publication, que la Grande Casserole était en fait un amas ouvert, le plus proche amas ouvert … Bref, il règne dans cette typologie de figures célestes une certaine confusion, je trouve… J’aimerais quelques précisions et avis autorisés sur ce sujet.

 

On reprend…

 

Le Sud

 

Nous arrivons au bout de nos peines (de bien douces peines en vérité, que l’esclavage céleste est donc tant exquis !), il nous reste à relever la trace et à débusquer 5 globulaires et l’affaire sera entendue. Commençons par rejoindre Kaus Ausrralis et balayons les cieux en nous dirigeant vers Ascella (encore un nom enchanteur), l’extrémité inférieure Est du récipient.

On commence par trouver M69, en déviant un tout petit peu vers le Nord Est sur la route d’Ascella. Il y a une étoile juste à son Sud, toute proche. Ce messier n’est pas facile.

 

J’entends déjà les commentaires ironiques des chevronnés du ciel… « Un messier difficile? Pff… » Je me vois contraint de rappeler que ces posts sont sis dans la section « débutants » et destinés à illustrer la relative facilité à pointer sans aide électronique avec un dobson ou une simple monture azimutale…Merci désormais, de ne plus m’interrompre par des interventions non pertinentes.

 

Il y a un NGC (6552) juste par là, au Sud Est, qui peut compliquer la tâche de repérage et identification. Il est nettement plus faible (mag 8.0 comparée aux 7.7 de M69). Donc no soucy, l’un n’est pas l’autre…Nous avons ensuite M70, à mi-chemin entre la Kaus du Sud et Ascella. Et enfin M54, du côté d’Ascella (on va dire à 25% du segment Ascella – Kaus Australis). Un petit triangle d’étoiles au plus près Sud de M54 peut aider à le serrer.

 

Restent maintenant les deux derniers globus sagittariaux, en dehors de la théière. Si j’en crois mes CROAS, je ne les ai encore jamais observés (à chaque année suffit sa peine), mais restons – exceptionnellement - dans le domaine spéculatif et voyons les documents de navigation : Il y a M55, que l’on trouve en alignant Nunki (connue) et Tau (le bas Est de l’anse), et en tirant environ 2 fois la distance des deux étoiles. Chemin faisant, on traverse un petit triangle. M55 est un peu plus loin, mais bien situé sur la ligne.

 

M75, lui, se trouve sur l’alignement Kaus (toujours Australis) et Ascella (elle me plait celle là, avec son nom chantant, aérien…), deux fois la longueur. A une fois la longueur on croise un doublet d’étoiles au Nord et une croix au Sud, puis au bout un petit triangle, et M75 est là, juste un peu au-delà du triangle, on devrait le tenir, et ce sera la fin de notre quête messierine dans le Sagittaire.

 

That’s all, folks !

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La Grande casserole n'est pas un amas ouvert. Mais cinq de ses sept étoiles, ainsi que d'autres étoiles plus faibles de la région, constituent une association stellaire, c'est-à-dire un ensemble d'étoiles éloignées les unes des autres mais partageant le même mouvement propre. Il s'agit donc d'étoiles provenant d'un même amas ouvert mais qui sont aujourd'hui dispersées.

 

Si j'ai bien compris.

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(texte cité)

Il s'agit donc d'étoiles provenant d'un même amas ouvert mais qui sont aujourd'hui dispersées.

 

OK, merci pour ces précisions Bruno. Je viens de me souvenir avoir lu quelque chose comme cela dans le Burnham Celestial Handbook. Faut que je retrouve (dommage qu'il soit pas en ligne sur le net ce bouquin ! :)).

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Et celui de Jeff prend forme! Allez, Jeff, encore plus de poésie -il n'y a jamais assez de poésie, ce n'est pas Patte qui me contredira, encore plus plonge nous dans ce détachement des vacuités humaines qui sont le fondement de tes bal(la)ades, et fais le, ce livre!

 

Au fait, je croyais qu'un amas était un amas si et seulement si ses étoiles étaient gravitiquement liées... Me trompe-je? Et si c'est bien le cas, les étoiles du Hibou NGC457 sont liées?? Merci de me déniaiser...

 

 

Amitié et admiration,

 

GG :)

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Pourquoi elles ne seraient pas liées ? (les étoiles du Hibou)

 

L'étoile Phi Cassiopée est considérée par les astronomes comme faisant partie de l'amas. Il y avait eu une discussion à ce sujet dans un autre forum, et c'était ce qui était ressorti d'une consultation d'abstracts de publications astrophysiques.

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Ah d'accord... C'est vrai que c'est un amas assez unique en son genre à ce niveau là.

 

Encore que, il y a NGC 6885 qui ressemble, je trouve, à une couronne de fleurs (il n'y a pas d'étoiles brillantes au centre). Et en cherchant bien on doit en trouver d'autres comme ça...

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Ah oui, M6, bien sûr ! (NGC 6885 n'est pas connu, mais il est facile, attention).

 

Un autre exemple : l'amas de l'Arbre de Noël (NGC 2264), qui a vraiment la forme d'un sapin, surtout à l'oculaire d'un Newton avec le nord en bas. Finalement, quand on réfléchit un peu...

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  • 3 mois plus tard...

Restent maintenant les deux derniers globus sagittariaux, en dehors de la théière. Si j’en crois mes CROAS, je ne les ai encore jamais observés (à chaque année suffit sa peine), mais restons – exceptionnellement - dans le domaine spéculatif et voyons les documents de navigation : Il y a M55, que l’on trouve en alignant Nunki (connue) et Tau (le bas Est de l’anse), et en tirant environ 2 fois la distance des deux étoiles. Chemin faisant, on traverse un petit triangle. M55 est un peu plus loin, mais bien situé sur la ligne.

 

M75, lui, se trouve sur l’alignement Kaus (toujours Australis) et Ascella (elle me plait celle là, avec son nom chantant, aérien…), deux fois la longueur. A une fois la longueur on croise un doublet d’étoiles au Nord et une croix au Sud, puis au bout un petit triangle, et M75 est là, juste un peu au-delà du triangle, on devrait le tenir, et ce sera la fin de notre quête messierine dans le Sagittaire.

 

J'ai observé ces deux globus la semaine passée depuis un coin sombre (une fois les lampadaires éteints) du Finistère Sud, non avec un dobson mais avec ma Televue76 (sur monture azimutale), équipée d'un QuickPoint.

M55 est très facile, sur le cheminement indiqué, il est assez gros (mais bas sur l'horizon). M75 est un peu plus délicat car assez petit (c'est un des globulaires les plus éloignés je crois). Le chemin (double au Nord, croix au Sud, penchée dans la direction de la double, donc le triangle introductif du messier est par son travers) fonctionne bien : En vérité juste après le triangle, il y a un autre triangle de taille comparable et d'étoiles plus faibles, et M75 est inséré sur un côté de ce second triangle. Bien que petit, sa nature de globulaire apparait sans ambiguité dès l'observation-repérage avec les jumelles 15X50.

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