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De la Somme aux Vosges.

 

 

Bonjour à toutes :) et bonjour à tous :) ,

 

Il y a eu voici deux jours cent ans, le samedi 29 août 1914, mon grand-oncle Charles Boucher, agriculteur à Antony (Seine) a quitté vers 11h30 les champs où il travaillait depuis le matin pour aller chercher au libraire de la rue de l'Église le journal "Le Petit Parisien" daté du jour (n° 13 818) afin de commenter devant toute la famille rassemblée, lors du déjeuner, les dernières nouvelles de la guerre et spécialement les deux communiqués quotidiens du Grand Quartier Général français. A cette époque la presse quotidienne était le seul moyen de savoir ce qui se passait lors des combats contre l'armée allemande à l'Est et au Nord de la France vu qu'il n'y avait point de radio, ni de télévision et encore moins d'Internet.

 

La famille Boucher n'avait pas l'habitude de lire quotidiennement le journal, elle le fit à partir du dimanche 9 août 1914 où d'autres paysans antoniens lui apprirent que la guerre commençait très bien par une victoire avec la prise de Mulhouse !... :be: :be: :be: (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k565154c.image). Décidément, ceux qui pronostiquaient une guerre victorieuse et très courte (les soldats français seraient démobilisés dès la fin septembre 1914 après avoir pris Berlin) semblaient avoir raison. ;) La famille Boucher était cependant beaucoup plus prudente car en novembre 1870 elle avait dû fuire de toute urgence à Paris (où elle resta durant six mois) vu que les Prussiens allaient occuper Antony. Cet exil parisien forcé avait convaincu mon arrière grand-mère sa fille et ses trois garçons de la très grande puissance de l'armée allemande. D'où ce besoin d'acheter chaque jour "Le Petit Parisien" afin de savoir si la menace allemande était véritablement écartée. :confused:

 

Le Petit Parisien du vendredi 28 août 1914 (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k565173p.image) n'annonçait rien d'inquiétant, bien au contraire, dans son titre en "une" (sur 4 colonnes sur 6) : « CINQ JOURS D'OFFENSIVE HEUREUSE EN LORRAINE. LES PERTES DES ALLEMANDS SONT ÉNORMES. » Cependant, le titre ― en beaucoup plus petits caractères ― juste au-dessous (toujours sur 4 colonnes sur 6) était, lui, franchement inquiétant ! : « Sur la Meuse, nous repoussons énergiquement une attaque de l'ennemi. Dans le Nord, nos alliés anglais ont dû légèrement rétrograder. Longwy n'a capitulé qu'après une héroïque résistance. » Si on comprenait bien, cela signifiait que les troupes allemandes, et non les troupes françaises, étaient partout à l'offensive et que l'armée française n'avait pas réussi à empêcher les Allemands de prendre Longwy, chef-leu de canton de la Meurthe-et-Moselle. Ce numéro du Petit Parisien reproduisait les deux communiqués habituels du Gouvernement : celui de l'après-midi (à 15 heures) qui annonçait faussement : « Dans la région entre les Vosges et Nancy, nos troupes continuent à progresser. » et celui de minuit qui annonçait, lui aussi faussement : « Dans le Nord, l'armée anglaise attaquée par des forces très supérieures en nombre, a dû, après une brillante résistance, se reporter un peu en arrière. A sa droite nos armées ont maintenu leurs positions. »

 

Le Petit Parisien du samedi 29 août 1914 (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k565173p.image) annonçait a priori une pause dans les combats dans son titre en "une" (sur 3 colonnes sur 6) : « Un temps d'arrêt dans les hostilités ? Les derniers combats furent extrêmement meurtriers. » Bien entendu aucun chiffre des pertes françaises ne fut communiqué. Ce ne sera que bien après l'Armistice du 11 novembre 1918 que sera révélé l'horrible bilan des combats dits de "la bataille des frontières" du samedi 22 août 1914 (http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/08/22/le-massacre-du-22-aout-1914_4475342_3224.html): 27 000 soldats français tués en une seule journée !!!... Dont 11 900 à Rossignol en Belgique :cry: :cry: :cry: (http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Rossignol). La bataille de Waterloo le 18 juin 1815 n'avait entraîné la mort que (si j'ose dire) de 7 000 soldats français. :( :( :(

 

Mais, ce samedi 29 août 1914, c'est la brièveté ― très inhabituelle ― du seul communiqué de la veille qui consternera tous les Français, car le Gouvernement français s'est enfin résolu à annoncer au peuple la très triste réalité des combats franco-allemands : « La situation de notre front, de la Somme aux Vosges, est restée aujourd'hui ce qu'elle était hier. Les forces allemandes paraissent avoir ralenti leur marche. ».

 

En revenant à la ferme familiale pour commenter ce communiqué, mon grand-oncle Charles sera très pessimiste : de nouveau les Allemands vont sans doute gagner la guerre !... La famille Boucher a alors songé très sérieusement à évacuer la ferme familiale pour se réfugier dans la famille de ma grand-mère à Neuville-aux-Bois dans le Loiret. C'est uniquement l'état de santé de mon arrière grand-mère, âgée alors de 83 ans, qui était paralysée des deux jambes et asthmatique, qui les a obligés à rester sur place à Antony en attendant une nouvelle arrivée des soldats au casque à pointe... :confused:

 

Le Petit Parisien du vendredi 4 septembre 1914 confortera cette sinistre impression en révélant que le Gouvernement français s'est courageusement enfui à Bordeaux... :mad: :mad: :mad: (http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k565180w.image)

 

En revanche, le Petit Parisien du lendemain (samedi 5 septembre 1914 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5651818) réjouira enfin mon grand-oncle Charles en lisant la proclamation du général Galiéni, le Gouverneur militaire de Paris : « J'ai reçu le mandat de défendre Paris contre l'envahisseur... Ce mandat, je le remplirai jusqu'au bout. ». Enfin, l'armée française qui défendait Paris avait un chef énergique, contrairement à Joffre qui était bien mou... :confused:

 

Et puis, vous connaissez évidemment la suite : l'inespérée victoire lors de la bataille de la Marne du samedi 5 au samedi 12 septembre 1914 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5651907.image.

 

Voilà, c'était ce qu'on pouvait lire dans le Petit Parisien il y a cent ans.

 

799px-Le_Petit_Parisien.png

 

Roger le Cantalien. :rolleyes:

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