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Salut!

 

Pré-commandés en Mars, reçus la semaine dernière, on peut dire que l’attente fut longue pour enfin essayer ces oculaires, annoncés comme révolutionnaires par la firme Denkmeier. Russ, son créateur, n’y est pas allé de main morte sur le teasing sur le forum cloudynights, et les premiers retours d’utilisateurs au fil de la production s’avéraient plus que prometteurs…

 

 

 

A_W_LOA21_2.jpg

 

 

 

Au déballage, on trouve pour chaque oculaire une boîte en plastique à vis hélicoïdale, fort pratique, et les traditionnels bouchons d’entrée et de sortie, qui s’ajustent fermement.

 

Esthétiquement, les oculaires dégagent une impression de solidité et de simplicité. L’ensemble est en alu anodisé noir, et le design très sobre. Compacts, denses, et bien finis, ils respirent la qualité.

 

Mécaniquement, rien à redire. Les jupes en 31,75mm coulissent lentement et sans jeu dans le porte-oculaire, signe d’un usinage de qualité. Il n’y a pas de gorge mais un profil légèrement conique, ce qui arrangera aussi bien ceux qui possèdent un P.O. à serrage annulaire comme à vis.

 

Sur le confort maintenant. Choix de la focale (21mm), champ apparent (65°), poids contenu et petites dimensions, grande lentille de sortie et long dégagement oculaire, placement de l’oeil intuitif et aisé, on peut dire que Denk connaît les utilisateurs de tête binoculaires et leurs attentes. Sur ce point, les LOA sont parfaits, ni plus, ni moins. Il est très facile de trouver sa position d’observation et de la conserver sans fatigue.

 

Optiquement, le champ ne souffre pas trop de la coma à F/5. Ce n’est pas du niveau des oculaires haut de gamme de chez Televue ou Pentax sur ce point, mais c’est amplement exploitable sans correcteur. Sur un sujet diurne, les déformations géométriques semblent négligeables, et les couleurs neutres. De nuit, le piqué est excellent et le contraste magnifique. A côté, mes SWAN 20mm font vraiment pâle figure. On retrouve les sensations d’un bon Plossl, le champ, la correction, et le confort en plus.

 

Mais que sont ces LOA au juste? Il s’agit d’une paire d’oculaires dédiés à un usage binoculaire (tête bino, grosses jumelles, binoscope). Leur particularité est de délivrer des images dites «*en 3D*» pour les observations du ciel profond exclusivement.

 

L’oculaire dit «*neutre*», ne présente pas, dans sa présentation, de différence notable avec un oculaire classique. L’autre, «*actif*», contient le fameux Lederman Optical Array. Comme on voit sur la photo ci-dessous, l’array se présente sous la forme de 5 carrés collés sous la lentille d’entrée. On remarque que les carrés ne sont pas disposés tout à fait orthogonalement. La colle est une colle dite optique et est effectivement invisible sur le terrain.

 

 

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Comment ça marche? Malheureusement, le système est breveté et le secret jalousement gardé, Russ ne communique pas du tout sur le principe optique associé à cet arrangement. N’étant pas moi-même opticien, je n’ai donc aucune idée de son fonctionnement.

 

Sur l’oculaire actif, il y a une pastille bombée, N (Near), que l’on présentera face à soi, ou à l’opposé (180°), par rotation de l’oculaire dans son P.O. :

- pastille N face à soi, le centre du champ passe «*devant*», et semble flotter devant nos yeux

- pastille N à l’opposé, le centre du champ passe derrière, et semble être perdu loin dans l’espace

 

Mais alors ça donne quoi sur le ciel me direz-vous? Avant de répondre à cette question, je voudrais insister sur la liste des pré-requis nécessaires à l’exploitation correcte de ce système. Mes premières observations avec les LOA ont été fort décevantes car je n’avais pas respecté une ou plusieurs de ces conseils :

- utiliser une tête binoculaire bien collimatée. La plupart des bino moyen et haut de gamme (Baader, Denkmeier, Televue, Siebert, Zeiss…) sont correctement alignées d’usine. Ce n’était pas le cas de ma TS bon marché, pour laquelle j’ai dû moi-même recollimater les prismes. Là où ça ne gênait pas trop avec mes autres oculaires, les LOA demandent un réglage au poil. Pas une mince affaire.

- observer sous un bon ciel. Les LOA nécessitent un ciel raisonnablement noir pour s’exprimer. Sous mon ciel péri-urbain (voie lactée tout de même visible au zénith en été), c’est suffisant semble-t-il, mais j’ai hâte de les essayer sous un ciel d’encre. Je n’ai pas fait l’essai en période lunaire.

- avoir à disposition une palette de grossissements en amont de la bino (PowerSwitch, Extender, OCS, barlows, powermates…). Le cadrage de l’objet est primordial avec les LOA, et cela passe par sa mise à l’échelle.

 

 

 

Passons à l’observation!

(Le télescope utilisé est un dobson Orion 200 F/5)

 

M11 : 50X, N derrière, sans filtre. L’amas semble passer derrière le champ richement étoilé. On a la sensation de se diriger vers lui, là-bas au fond. Les distances prennent forme, c’est vertigineux.

 

M31 : 50X, N devant ou derrière, sans filtre. Pas d’effet 3D sur cet objet très étendu, mais l’excellent contraste généré permet de deviner une bande sombre inaccessible habituellement dans ces conditions.

 

M13 : 50X, N devant, sans filtre. Joli piqué à ce faible grossissement. L’amas est toutefois clairement au premier plan, comme suspendu devant les yeux.

 

M92 : 120x, N derrière, sans filtre. Comme pour M11, le globulaire semble inaccessible, loin de nous. Très réaliste.

 

M71 : 120X, N derrière, sans filtre. Un objet qui ne m’a jamais transcendé. J’y ai passé 20 minutes, et ça a été le départ d’une balade inopinée dans la Flèche. L’effet de prondeur est saisissant dans le champ autour de l’amas partiellement résolu. Un des clous de la soirée

 

Double-Amas : 50X, N derrière, sans filtre. En laissant lentement défiler les amas, ils semblent se transformer progressivement, comme si l’on s’en approchaît physiquement et que la parallaxe les déstructurait. Très différent de la vision habituelle, mais tout aussi excitant.

 

M57 : 120X, N devant, filtre UHC. L’anneau semble palpable et flotte au premier plan. De jolies nuances de gris à l’intérieur. Ma meilleure observation de cet objet avec ce télescope.

 

M27 : à 120X, N derrière, filtre UHC. Dumbell perdue dans l’espace. L’étoile centrale entraperçue, la forme générale très claire. Beau!

 

M17 : 50X, N derrière, filtre UHC. Le ciel est trop lavé par là-bas pour une observation satisfaisante, mais les extensions sont étonamment assez développées.

 

M52 : 50X, N derrière, sans filtre. Là encore un objet que je ne vais que rarement voir. Plus maintenant.

 

NGC 457 : 50X, N devant, sans filtre. Un amas spectaculaire avec les LOA, le placement de l’objet dans le champ est toutefois délicat.

 

Rose de Caroline : 50X et 120X, N derrière, sans filtre. Très bien résolu, l’amas dévoile ses lignes sombres caractéristiques dans un doux poudroiement.

 

Albiréo : 50X, N devant, sans filtre. Le joyau devant les yeux, et la voie lactée derrière qui s’étale en volume. Magnifique.

 

Dentelles du Cygne : 50X, N devant, filtre UHC. Objet difficile chez moi, mais région toutefois splendide, avec ses groupements d’étoiles suspendues à plusieurs niveaux de profondeurs.

 

 

 

Bref. Vous l’aurez compris, je n’ai rarement été autant émerveillé astronomiquement que cette nuit-là. Ces objets observés sous toutes les coutures, depuis des années, à travers plusieurs types d’instrument, d’oculaires, de filtres, de ciels… apparaissent simplement Nouveaux. La redécouverte est totale, pour ne pas dire déroutante de prime abord. Il faudra habituer ses yeux et son cerveau à cette nouvelle façon d’observer…mais mes autres oculaires commencent à trembler dans leurs boîtes.

 

Ce qui surprend, c’est qu’on n’a définitivement pas affaire ici à une 3D de type «*cinéma*», à fond les ballons et plein la figure. A la place, se dégage une impression de naturel, de survol, de plongée. On quitte l’abstraction d’une image plane pour vivre à la place, sans céder aux sirènes du sensationnalisme. C’est vraiment beau. Et pourtant, je ne saurai insister sur la subtilité de l’effet, qui décevra l’impatient ou le scientifique. Les LOA sont conçus pour le comtemplatif.

 

A tel point que l’on peut se perdre et se laisser happer au détour d’un pointage, chose que je n’avais plus fait sous mon ciel depuis longtemps. Le fait de pouvoir composer soi-même la perspective d'une scène (rotation de l'oculaire, grossissement, placement dans le champ) permet de vraiment se faire plaisir.

 

Aussi, le confort apporté est tel que la durée d’observation augmente considérablement pour une cible donnée, apportant son lot de détails et de finesses que je croyais innaccessibles à cet instrument sous ce ciel. Le contraste semble propulsé en avant. En d’autres termes, la sensation jouissive «*d’y être*» donne envie d’y rester, et conséquence, la qualité objective des observations s’en ressent également.

 

Mais il y a un mais.

De par leur conception, les LOA ont un défaut majeur connu et déjà documenté. Vous vous souvenez des carrés dont je parlais plus haut? Et bien lorsqu’une étoile brillante traverse l’un de ces carrés, elle se dédouble et son image fantôme apparaît juste à côté pendant quelques instants. Cet artefact est ainsi très souvent présent. On peut l’ignorer où ce peut devenir une obsession. A chacun de voir comment il pèse dans la balance, au regard du tableau général.

 

Je ne saurai, vu le prix d’importation, que conseiller l’essai approfondi et dans de bonnes conditions de ces oculaires avant de se décider à l’achat. Ils ne plaîront assurément pas à tout le monde. L’addition est salée, et les bénéfices dans l’ensemble subjectifs.

 

 

Mais force est de constater que, pour une fois, la publicité disait vrai : les LOA sont une véritable révolution.

 

 

 

‘clock

 

 

Edit : Nouveau, un compte-rendu en anglais très détaillé, suivi d'une petite discussion : http://www.cloudynights.com/page/articles/cat/user-reviews/the-lederman-optical-array-loa-21-3d-eyepiece-r2997

Modifié par alarmclock
Posté

Merci pour ce compte-rendu bien foutu!

 

Une question:

 

Leur particularité est de délivrer des images dites «*en 3D*» pour les observations du ciel profond exclusivement.

 

Cela pourrait être marrant sur la lune?

Ou alors donner du mal au crâne?

 

Ou les rares fois qu'une planète offre une perspective cosmique en passant près d'un amas ou autres...

 

Curieux de savoir ce que ça donnerait!

 

Patte.

Posté (modifié)
Merci pour ce compte-rendu bien foutu!

 

Une question:

 

 

 

Cela pourrait être marrant sur la lune?

Ou alors donner du mal au crâne?

 

Ou les rares fois qu'une planète offre une perspective cosmique en passant près d'un amas ou autres...

 

Curieux de savoir ce que ça donnerait!

 

Patte.

 

 

Sur la lune, si tu la grossis au delà de la surface du carré du milieu, tu vas avoir une lune découpée en carrés à des profondeurs différentes :p

Par contre avec un instrument à courte focale, et tant qu'elle sera au centre du champ (au centre du carré central), elle te sautera probablement à la figure, ça peut le faire!

 

Sur des planètes, des rencontres cosmiques comme tu dis, il y a surement moyen d'expérimenter de belles choses.

Modifié par alarmclock
Posté

Excellent test, un gros merci !

 

ça donne envie, mais l'image fantôme avec une étoile brillante gâche un peu le tableau...

 

Faut que je me teste ça en vitesse ! ;)

 

Brice

Posté
Excellent test, un gros merci !

 

ça donne envie, mais l'image fantôme avec une étoile brillante gâche un peu le tableau...

 

Faut que je me teste ça en vitesse ! ;)

 

Brice

 

C'est toi qui avait fait le strock 300 non?

edit : Ah bah oui c'est marqué dans la signature :be:

Tu peux te les procurer facilement pour test?

Posté (modifié)

Alarmclock, tu as essayé voir ce que ça donne en changeant l'oculaire "actif" position œil directeur ou l'oeil suiveur?

 

Patte.

Modifié par syncopatte
Posté (modifié)

Oui j'ai fait cet essai syncopatte. Je trouve que c'est beaucoup plus naturel avec l'oculaire actif côté oeil non-directeur (le droit pour moi). Je suppose qu'ainsi le cerveau est moins perturbé par la bizarrerie du signal qu'il reçoit de ce côté.

 

Un truc important avec les LOA, c'est d'observer "détendu". On est habitués à une image plane dans nos télescopes, et naturellement on aurait tendance à chercher à corriger l'effet de profondeur obtenu avec ces oculaires. Naturellement c'est impossible, alors lorsqu'on se crispe, l'image peut devenir confuse. Il ne faut pas chercher à corriger mais vraiment se laisser aller dans l'image. C'est entre-autres pour ça que je dis que c'est déroutant au départ, c'est littéralement une nouvelle manière d'observer :)

Modifié par alarmclock
Posté

Merci pour ce compte rendu, tu restitues vraiment bien ton expérience de ces oculaires et leurs particularités!

On aimerait que les descriptifs commerciaux de pas mal d'objets soient rédigés comme ça! Ca éviterait à beaucoup de réaliser trop tard qu'ils n'ont pas choisi ce qu'ils cherchaient.

Moi ton descriptif me donne envie: immersion et attitude contemplative!

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