divers Un ciel avec un SQM à 22.00, "ça chang' tout !"

[Bertrand13]

Bonsoir à Toutes et à Tous,

 

Nous nous sommes tous plains d'une météo maussade pendant les derniers mois, mais heureusement, il y a eu Avril !

Dans la Haute Provence, les nuits des 19, 20, et 21 Avril 2017 ont été exceptionnelles: précédées de plusieurs jours de fort mistral, elles ont été d’une transparence exceptionnelles: l’humidité est toujours resté <40%, et, à cheval sur la nouvelle lune, le SQML n’est jamais descendu en DESSOUS de 21.80. Il a atteint la deuxième nuit 22.00, mesuré par deux observateurs différents, avec deux SQM différents. Ce sont des valeurs rarement atteintes en métropole, et qui sont tout à fait comparables aux ciels chilien ou namibien. Malheureusement, le seeing est resté à des valeurs de 4.0" à 5.5", une conséquence normale du mistral.

 

Dans ces conditions, je me suis concentré sur les halos externes des galaxies ou des nébuleuses planétaires, dont les limites floues sont moins sensibles à la turbulence, mais dont le caractère diaphane nécessite un ciel d’une grande noirceur.

 

Et celà m'a permis de voir près d'une douzaine de cibles comme je ne les avais jamais vues.

Trois exemples:

 

M 104, la galaxie du Sombrero:

 

 

x148 Ethos 21mm

 

Ce qui me frappe c’est que, en observant longtemps et en VI, l’existence d’un halo très faible et très étendu apparait. Ce halo a des limites très progressives, et il est beaucoup moins allongé que la galaxie: il est elliptique, a/b ~ 1.5, et A* est un très bon repère pour apprécier son étendu dans la direction "verticale". Je l’ai tracé, sans le connaitre, exactement aux limites de Guide8, soit 7.9′ x 3.9′. L’isophote L2 est beaucoup plus réduit, 6.6′ x 1.6′, et je n’ai pas remarqué de renforcement net de de halo entre A* et le noyau de la galaxie.

 

Avec le seeing à 4.0", il est impossible de distinguer des détails sur le disque (comme j’en avais suspecté au T1000 de Puimichel), ni d’analyser la bande sombre. Mon dessin de ce jour est donc la reprise de celui de 2008, sur lequel j’ai simplement surimposé le halo externe perçu au cours de la nuit présente.

 

NGC 6826, la nébuleuse clignotante

 

 

x780 Ethos 8mm/barlow x2/OIII-5nm

 

J’observe à l’oculaire du T635, avec suivi, de Jean-François Verrier. La CS* n’est, bien sûr, pas vue, et le disque est extrêmement lumineux, MAIS l’anneau interne est perçu, difficile mais sûr, L9 sur fond L8. De même, sa forme, ni mandorle (mot employé dans mon compte rendu de 2013) ni ellipse, mais ovale déformé est noté; c’est la première fois que je perçois cette dissymétrie entre les deux côtés de l’anneau. Je n’ai pas perçu de sombre à l’intérieur de l’anneau interne.

 

Nota: je n’ai pas cherché ni pensé à observer les deux coucougnettes latérales sur le disque, ni le disque en lui même, car toute mon observation a été centrée sur la perception, encore jamais eu aussi précise, de l’anneau interne; d’ailleurs, la turbulence, plus que moyenne, m’en aurait empêché. Mon dessin n’est donc qu’une mosaïque composé du disque de 2009, avec l’anneau interne reprécisé, et du halo externe, tel que perçu la présente nuit. Et rien de plus. C’est pourquoi j’ai conservé le cartouche de 2009 pour mon dessin de 2017.

 

Troisième et dernier exemple, peut être le plus "plus": M 51, la plus belle des galaxies boréales:

 

 

x148 Ethos 21mm

 

Je me concentre sur les isophotes L1, L2, et L3 (sur 10 échelons). La galaxie est presque au zénith, et à ce G, la turbulence n’est pas gênante, si l’on reste sur le halo sans vouloir rentrer dans le détail des spires. Les espaces inter-spires sont bien sombres, O1 à O3 (sur 6 échelons).

Il faut beaucoup d’attention pour tracer les contours, autant des nébulosités lumineuses que sombres. Mais ma patience est récompensée: c’est la première fois que j’ai vu, difficile, la bande sombre dans le pont.

Je continue mon observation de la veille, dans un ciel identique sinon meilleur (le SQML a atteint 22.00 cette nuit là). Le seeing est fort, et je ne peux toujours pas rechercher des détails dans les spires. Malgré tout, elles sont évidentes, et je commence par localiser, à l’intérieur de celles ci, les portions les plus lumineuses (en rose sur mon croquis): elles s’étagent de L4 à L7.

La zone centrale est circulaire, de L8 à L5 en dégradé, avec une CS stellaire à 240x. Cette zone centrale est bleutée, C130/S10, et la CS est C130/S20; c’est la seule zone de la galaxie avec de la couleur, ce que j’avais déjà noté au T1200 de l’OHP.

Malheureusement, le seeing m’interdit de percevoir d’autres détails, et je préfère attendre une nuit plus calme pour "rentrer" dans les spires. Pour permettre de situer exactement celles ci par rapport à mon dessin proprement dit (halo + espaces inter-spires + condensation centrale et noyau), j’ai surimposé l’image de Gendler, suffisamment atténuée pour ne pas perturber la partie dessin. Lorsque j’aurai pu analyser les spires, je rajouterai les calques des étoiles surimposées et des régions HII, qui on déjà fait l’objet de dessins séparés, et auxquels on peut déjà se reporter.

 

Vous trouverez tous les comptes rendus détaillés sur http://www.deepsky-drawings.com/

ainsi que beaucoup d'autres, comme M 102, M 106, le Fantôme de Jupiter, les Antennes, etc, etc, tous avec des halos lumineux surprenants par leur intensité et leur étendue.

 

Bon ciel à Tous

Bertrand

[exaxe]

Houlala! Quelle serie!

M51 est vraiment tres bien reussie! cette legere teinte bleutée au centre...

[Arch Stanton]

Quelle claque !!!!!!!

M51 est ...comment dire ........Magnifique

Bravo

 

Laurent

[José9]

Salut Bertrand,

 

Très belle série, j'aime beaucoup 6826 avec les petits renforcements.

 

Pour M51, comment as-tu procédé? En annotant directement sur une photo puis en passant la photo en n/b et en ajoutant les zones du halo/ zones sombres que tu as vues? Le rendu m'intrigue

 

Astronomicalement

José

[Bertrand13]

Bonjour à Tous et à Toutes,

 

Le DAAO (dessin assisté par ordinateur) semblant intéresser de plus en plus certain d'entre vous, je crois que l'image de M51 peut être un bon exemple de la méthode de dessin que j'ai déjà eu l'occasion de détailler dans le chapitre correspondant du livre Astrodessin.

 

Vous pouvez visualiser, dans l'image ci dessous, les étapes successives de la réalisation du dessin.

 

 

Elle se lit de gauche à droite, puis de haut en bas (comme une page écrite):

A: isophote L1, B: isophote L2, C: isophote L3, D: A+B+C

E: D + isophotes O1+O2+O3, F: E + image Gendler, G: F + spires+, H: G + CS + noyau

 

Quelques explication supplémentaires:

- pour chaque isophote L, pot de peinture blanche, intensité 6%

- pour chaque isophote O, pot de peinture noire, intensité 15%

- image Gendler: décolorée, intensité 9%

- spires+: régions des spires les plus lumineuses: lasso + pot de peinture blanche, intensité à la demande, de 6 à 12%

- CS: Condensation Centrale, lasso sélection ellipse, intensité 60/100, progressivité 75/200, couleur C135, saturation S15%

- Noyau: lasso, sélection éllipse, intensité 100/100, progressivité 15/200, couleur C135, saturation S25%

 

Lorsqu'on empile les calques, les intensités de chaque calque pris globalement peuvent varier de +/- 10 ou 20%, pour retrouver à l'écran l'impression visuelle mémorisée à l'oculaire.

Tous les chiffres ci dessus sont quasiment les mêmes pour tous les logiciels habituels, Gimp, Paintshop Pro, Photoshop, etc.

 

J'espère que tous ces détails ne vous ont pas trop rebuté, et qu'ils pourront vous aider si vous décidez d'employer cette méthode.

Faites attention! Si vous vous y frottez, vous ne pourrez plus vous en passer...

 

Bon ciel à Tous

Bertrand

[José9]

Il y a donc effectivement l'ajout de l'image lors du post-traitement mais je ne sais toujours pas si tu t'en sers comme base à l'oculaire

 

Merci pour tes explications.

 

José

[Bertrand13]

Bonjour José 9,

 

Si tu veux bien aller voir sur http://www.deepsky-drawings.com/m-051-t635-halo/dsdlang/fr

tu auras toutes les phases de l'observations.

 

Mon croquis est réalisé directement à l'écran, détail après détail, l'ordinateur étant à l'abri, à une dizaine de mètres du dobson (à l'OBP, je bénéficie de conditions de confort optimales)

 

A l'école des Beaux Arts, lorsqu'on dessine une feuille d'acanthe au crayon, on noircit sa feuille de papier, détail après détail. Et bien, en ce qui me concerne, j'observe le plus attentivement possible à l'oculaire le détail qui m’intéresse de l'objet, je descends de l'échelle, je fais une dizaine de mètres, et je le retranscris en surimpression sur l'image que j'ai choisie (ici Gendler) telle qu'elle est visible en allant sur le lien ci avant.

Ces allées et venues sont incessantes, et dans le cas de M51, j'ai probablement du les faire une cinquantaine de fois, sur deux nuits successives. A noter que, comme l'échelle comporte huit échelons, et qu'au zénith, je monte chaque fois jusqu'au dernier, je n'ai pas besoin de faire de la gymnastique le lendemain !

 

Enfin je me sers de ce croquis comme base du traitement.

 

Bertrand

[José9]

Hello Bertrand,

 

Merci de détailler la méthode pour moi.

 

Je suis allé voir le lien mais je ne savais pas si la photo des isophotes était le croquis d'observation brut ou s'il était issu d'une superposition entre le croquis d'isophotes réalisé à l'oculaire et une photo de référence prise sur le net après l'observation pour comparer ce que tu as retranscrit à une photo. Car il est effectivement indiqué que tu t'en sers pour la "mise au propre" du dessin mais ce n'est pas mentionné sur la technique de mise en œuvre, ce qui m'intéressait au vu de la précision de situation de tes détails.

 

Tu dis que tu fais ton croquis directement à l'écran. Du coup comment procèdes-tu pour ne ne pas perdre de vision nocturne, tu fermes et couvres ton œil directeur?

 

Merci

José

[Vakoran]

Sombrero excellent ! Je le retrouve tel qu'observé lors de ma dernière sortie à Lure, où je n'avais pas pris la peine de le détailler, mais avec ce léger "virage" dans la bande sombre qui permet de comprendre qu'elle en fait le tour. On peut sans doute en voir plus par conditions parfaites, mais tout de même, c'est déjà un sacré beau travail que voilà.

 

6826, je l'ai dessinée une fois au 250 mais elle n'avait pas grand-chose à voir. Il faudra absolument que j'y aille avec le 600 pour comparer plus justement avec ta vision.

 

Pour M51 enfin, le souci du détail et le boulot accompli est là indubitablement, mais je ne suis pas fan de l'ajout d'une photo en fond. Selon moi, ça enlève un peu de réalisme à l'ensemble. Ou alors, il est vraiment possible de la voir ainsi et c'est moi qui n'ai pas encore eu les bonnes conditions pour cela !

[Vakoran]

Sombrero excellent ! Je le retrouve tel qu'observé lors de ma dernière sortie à Lure, où je n'avais pas pris la peine de le détailler, mais avec ce léger "virage" dans la bande sombre qui permet de comprendre qu'elle en fait le tour. On peut sans doute en voir plus par conditions parfaites, mais tout de même, c'est déjà un sacré beau travail que voilà.

 

6826, je l'ai dessinée une fois au 250 mais elle n'avait pas grand-chose à voir. Il faudra absolument que j'y aille avec le 600 pour comparer plus justement avec ta vision.

 

Pour M51 enfin, le souci du détail et le boulot pharaonique accompli est là, indubitablement, mais je ne suis pas fan de l'ajout d'une photo en fond. Selon moi, ça enlève un peu de réalisme au rendu. Ou alors, il est vraiment possible de la voir ainsi et c'est moi qui n'ai pas encore eu les bonnes conditions pour cela !

[Bertrand13]

 

Pour M51 enfin, le souci du détail et le boulot accompli est là indubitablement, mais je ne suis pas fan de l'ajout d'une photo en fond. Selon moi, ça enlève un peu de réalisme à l'ensemble.

 

Salut Vakoran, salut Pertuis !

 

 

Je n'ai jamais voulu ajouter une photo pour rendre le dessin plus réaliste: en effet, il ne s'agit pas d'un dessin de M 51, mais d'un dessin du HALO de M 51.

 

Tu as certainement du remarquer que le titre du dessin sur le cartouche est " M 51 halo", et non pas M 51. Et comme je n'ai pas observé, et donc pas dessiné, les spires, mais seulement le halo, la condensation centrale et le noyau (ce que j'explique très clairement dans mes notes d'observations), le seul moyen de positionner ces éléments par rapport à la galaxie dans son ensemble, c'était d'y ajouter les spires.

 

Ce que j'ai fait par le moyen le plus simple: une photo. D'ailleurs, c'est un procédé que j'utilise chaque fois que je me concentre sur un ou plusieurs détails d'un objet, sans le dessiner dans son ensemble.

 

Dans le ces de M 51, à l'oculaire d'un grand diamètre comme mon T 635, il y a tellement de détails à dessiner que je le fais par petits bouts, en fonction du ciel, des conditions d'observations, etc...

A titre d'exemple, je me suis concentré précédemment sur les régions HII des spires, et là aussi, je les ai positionnées par rapport à une photo.

 

Voilà ce que ça a donné:

 

 

J'ai fait de même pour les étoiles surimposées, un jour où le seeing était très bon, et je le referai probablement pour NGC 5195, qui présente aussi de très nombreux détails, et bien sûr, pour les pires de M 51, spécifiquement.

 

Mais je te rassure , quand j'aurai observé tout ce que j'aurai pu, je n'aurai plus qu'à superposer tous ces calques, mais cette fois sans photo !

 

Amitiés à Tous

Bertrand

[Vakoran]

Merci pour les précisions, j'ai lu trop vite ce que tu avais déjà indiqué plus haut... J'aurais dû être plus attentif, et du coup je n'avais pas compris ce que tu essayais de faire !

 

Bon, du coup, j'ai hâte de voir ce que ça donnera une fois toute la galaxie observée et retranscrite. Ça risque de bien donner !