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Posté (modifié)

Bonjour tous,

 

Voici un petit récit d'une courte mission au Pôle Sud dans le but de réparer un détecteur à neutrons.

Je pratique de moins en moins les forums astro cependant je voulais partager ce périple qui sort un peu( beaucoup) de l'ordinaire qui s'est déroulé de fin octobre à début décembre 2021.

L'éclipse solaire de décembre n'était pas visible (il fallait être côté Chili) et de toute façon nous étions déjà rentrés...

Bonne lecture.

Cyrille

 

[Retranscription de l'article que nous avons rédigé mon collègue Nicolas et moi dans la lettre interne de l'Observatoire de Paris de mars 2022 avec quelques annotations de contexte]

 

Contexte scientifique (Nicolas Fuller, ingénieur CNRS- Observatoire de Meudon - LESIA)

 

 Le rayonnement cosmique, dans une gamme d'énergies allant de quelques centaines de MeV à une dizaine de GeV, est mesuré sur terre par un réseau d'instruments appelés moniteurs à neutrons (lien NMDB).

Le LESIA [labo de l'Obs de Meudon] a la responsabilité de deux de ces moniteurs, l'un aux îles Kerguelen (sub-Antarctique), et l'autre en Terre Adélie (Antarctique), gérés par le service CERCLe (lien).

Dans cette gamme d'énergies le rayonnement cosmique galactique, majoritairement constitué de protons, à la particularité d'être modulé par l'activité de notre étoile (cycle solaire).

En moyenne une fois par an des protons quasi relativistes issus des éruptions solaires peuvent également produire une augmentation brusque du nombre de particules atteignant l'atmosphère terrestre.

Au LESIA ces mesures participent à l'étude des phénomènes d'accélération de particules au Soleil et servent également, en partenariat avec l'Institut de Radioprotection (IRSN), à estimer les doses de radiations reçues par le personnel navigant de l'aviation civile (OACI). Le moniteur à neutrons de la station de Dumont d'Urville en Terre Adélie est constitué de 9 tubes de comptages.

L'un de ces tubes à cessé de fonctionner fin 2019 et une mission a été organisée avec l'Institut Polaire (IPEV) afin de remplacer ce dernier et de sécuriser l'instrument (les tubes contiennent une petite quantité de BF3, un gaz toxique).

 

 

Mission au pays des manchots (Nicolas Fuller & Cyrille Blanchard - moi - technicien LESIA)

 

 L'aventure débute le 27 octobre par un vol de Paris à Hobart en Tasmanie via Singapour et Melbourne.

Groupe d'une trentaine de compagnons, nous y restons confinés deux semaines avec une vue magnifique sur le parking de notre hôtel. 

Après notre 4ème test PCR négatif, nous ne sommes plus considérés comme une menace et on nous dépose au port où le brise glace l'Astrolabe nous attend pour prendre la mer.
Si le premier jour est calme, la haute mer nous réserve une houle autrement plus forte.

Au 4ème jour nous faisons une halte bienvenue à l'île Macquarie, pour débarquer et embarquer quelques collègues australiens.

Cap au sud-ouest. Trois jours de plus pour traverser les 50èmes "hurlants" et les 60èmes "déferlants"...

Enfin la mer se calme à l'entrée dans le pack, fine croûte de glace que l'Astrolabe fend sans difficulté.

Première claque, des paysages déjà magnifiques !

Escortés par quelques oiseaux polaires curieux de nous trouver là, nous naviguons près de grands icebergs dans la lumière irréelle du couchant.

Le 18 novembre, nous commençons à distinguer le continent.

Débarquement en zodiac et second effet "kiss-cool": les Empereurs et les Adélies en comité d'accueil, rien que ça !
La base de l'île des Pétrels, faite de bâtiments éparses, de tôle et de socles d'acier supportant froid et vents, se révèle sous une lumière éblouissante.

Les hivernants nous ont réservé un accueil que nous n'oublierons pas.
Très vite nous nous mettons au travail, la date de départ étant incertaine car une tempête pointe à l'horizon.

Raphaël [ingénieur hivernant sous contrat IPEV], qui s'occupe du moniteur depuis un an,  nous sert de guide.

Efficaces, nous démontons, remontons, dessoudons, ressoudons pendant quatre jours.

Ouf ça marche ! Le moniteur est bon pour le service !
Nous profitons du dimanche pour côtoyer nos compatriotes sur pattes.
Les Adélies, petites peluches nichant ça et là partout sur la base, ne se soucient aucunement de notre présence, trop occupés à survivre sur ce continent hostile.

Du haut de leurs nichées, accumoncellement de petits cailloux soigneusement choisis, ils protègent l’œuf unique à chaque instant.

Les Empereurs à la démarche lente et assurément impériale auront été plus difficiles à observer de près.
Le 23 novembre, il est déjà temps de penser au retour, un petit saut de puce en hélico et retour sur le bateau.

Un dernier au revoir à la Terre Adélie, aux icebergs et au pack pour 6 jours de pleine mer avec un roulis de tous les diables.

Re-60èmes, re-50èmes, une attraction de foire avec -/+40° de gîte.

Sensibles s'abstenir ou alors médicalisé à la scopolamine.

La diète pour l'un, le ravissement pour l'autre.
Hobart approchant, le périple redevient supportable.

Un ultime test PCR et nous voilà libres dans Hobart pour une journée de visite.
Retour à Paris au matin du 2 décembre via Brisbane et Singapour.
Fichtre quelle aventure !

 

Merci à l'IPEV, aux TAAF, à l'Observatoire de Paris, au CNRS aux hivernants (notamment Raphaël et Iban) et collègues du LESIA pour avoir rendu tout cela possible.

Nicolas Fuller. & Cyrille Blanchard. du LESIA

 

Photos en cours d'insertion

 

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Modifié par astroperenoel
  • Merci / Quelle qualité! 9
Posté

Bonjour

 

Merci pour le partage !

 

Effectivement, ça sort "un peu beaucoup" de l'ordinaire :lol:

 

Travailler pour l'astrophysique, ça peut vous mener loin !

Posté

Merci pour ce rendu, en effet magnifique. Ça me parait froid, et pourtant si je ne me trompe pas c'est l'été au mois de décembre?

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