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A l’occasion de l’année mondiale de l’astronomie en 2009, Nikon a lancé une gamme de 5 oculaires grand champ au coulant de 31,75 mm, basée sur leur gamme pour longues vues terrestres mais optimisée pour les observations astronomiques. Que valent-ils sur le terrain ?

 

Du matériel peu connu

Près de 15 ans après leur lancement, ces oculaires sont encore inconnus de la plupart des amateurs. D’une part, Nikon n’est pas une société « connue » pour œuvrer dans le domaine du matériel pour les astronomes, et de l’autre il n’y a pas beaucoup d’importateurs contrairement à leurs concurrents directs tels que Televue ou Pentax. Les Televue Delos et Pentax XW jouissent d’une solide réputation auprès des amateurs et ont des caractéristiques techniques similaires à celles des Nikon : un champ généreux et bien corrigé d’environ 70°, ainsi qu’un relief d’œil confortable d’environ 20 mm. A ma connaissance, le seul importateur en Europe des Nikon est APM Telescopes en Allemagne. Leur prix peut varier en fonction du cours de la monnaie, en Décembre 2023 il fallait compter en moyenne 400 CHF par oculaire, frais et taxes d’importation compris. C’est plus cher que les Pentax XW mais moins que les Televue Delos. Les focales disponibles vont de 17.5 à 5 mm, de quoi couvrir une bonne partie des besoins des amateurs mais malheureusement pas toutes, contrairement à la concurrence. Les Pentax existent de 40 à 3.5 mm, les Delos de 17.3 à 3.5 mm mais peuvent être complétés par le superbe série Panoptic qui va de 41 à 19 mm. Pour conserver un champ de 70°, un oculaire de plus de 24 mm de focale nécessite d’être monté au coulant de 50.8 mm.

 

Une ergonomie plutôt réussie

Chaque oculaire est livré dans une boite avec un œilleton amovible, des caches liés (ceux qui ont déjà perdu un cache dans leur mallette apprécieront !), et, chose rare pour un oculaire, le numéro de série est inscrit sur le corps ! En raison d’un grand relief d’oeil, la bonnète se dévisse afin de s’accommoder à chaque observateur, qu’il porte des lunettes ou non. Si vous dévissez trop la bonnette elle s’enlève complètement, attention donc lorsque vous la manipulée, si vous la dévissez trop et que vous soulevez l’oculaire par la bonnète, l’oculaire risque de finir sur le sol !

La première chose qui frappe, c’est le poids et le gabarit réduit, qui sont vraiment minimes pour un oculaire super grand champ ayant un relief d’œil généreux ! A part le 17,5 mm qui pèse 365 g, les autres ne pèsent qu’environ 300 g, c’est 100 g de moins que les Pentax XW ou Televue Delos ! Même si un solide renvoi-coudé au coulant 50,8 mm est préférable, il est encore raisonnable de les utiliser avec un renvoi-coudé au coulant de 31,75 mm. C’est moins vrai avec les Pentax XW, et encore beaucoup moins avec les Televue Delos qui en plus dont le coulant est affublé d’une assez profonde « gorge de sécurité » parfaire pour les serrages à vis que presque plus personne n’utilise, mais rédhibitoires si l’anneau de serrage de votre porte oculaire est trop large et/ou ne tombe pas au bon endroit…

 

Parfaits pour le ciel profond !

La plupart des tests ont été effectués avec une lunette TSA 120 de Takahashi, munie du renvoi-coudé 31,75 de la même marque.  Il s’agit d’un triplet apochromatique, garantissant une image bien corrigée de l’aberration chromatique et présentant un rapport f/d de 7,5.  Je n’ai pas pu tester sur des instruments plus courts tels que 5 ou 4, mais pour ce genre d’instrument je recommande de toute manière des Nagler ou Ethos, qui sont optimisés.

La première observation peut paraitre déroutante pour un observateur habitué à des plössl ou des orthoscopiques, car il faut bien régler la bonnète pour avoir le meilleur confort possible. Ceci fait l’observation à grand champ est très agréable, même si on ne retrouve pas la même sensation d’immersion qu’avec les légendaires Meade S4000 UWA ou certains Nagler….

L’image est bien corrigée sur l’intégralité du champ, et le grand champ résultant permet de pousser le grossissement de manière efficace et confortable sur les amas globulaires et les nébuleuses et galaxies de faible dimension. Lorsque le grossissement augmente, l’image s’assombri, le champ de vision se rétrécis, et il faut coller son œil à l’oculaire. Mais avec les 70° de champ apparent et le relief d’œil généreux des Nikon, l’observation du ciel profond est vraiment plus confortable par rapport à un oculaire plössl ou orthoscopique. Avec la TSA 120 la nébuleuse variable de Hubble baignant dans un champ d’étoiles est saisissante avec le 7 mm. Il en va de même des lointaines galaxies dans Pégase avec le 10 mm dans un C8. Quant à la perte de luminosité conséquente du nombre élevé de lentilles, en comparant le 17,5 mm avec un plössl Televue de 17 mm et le 7 mm avec un plössl Televue de 7,4 mm, je n’ai pas vu de différence. En effet, les traitements multi-couche dernier cri des lentilles font que la perte de lumière par surface air/verre n’est que de 0.25% à laquelle il faut rajouter 1% par cm d’épaisseur de verre. Un rapide calcul montre qu’un excellent plössl transmet 98 à 99% de la lumière contre 94 à 96% pour un oculaire grand champ de qualité comparable. Soit une perte de 5% dans le pire des cas, ce qui corresponds à 0,05 magnitude. Sachant que l’œil est capable de discerner des variations de 0,1 magnitude, il est donc impossible de voir une différence de luminosité entre un plössl et un grand champ, bien entendu de focales identiques et de qualité identique. Par contre, un très grand champ d’observation augmente de risque qu’une étoile brillante se trouve dans le champ, ce qui peut nuire à la détection des très faibles objets nébuleux à la limite de la visibilité…

 

Pas en reste sur les planètes

Malgré 12 surfaces air-verres, la vue des planètes est saisissante. Comparé avec l’excellent plössl 7,4 mm de Televue, le Nikon 7 mm ne montre pas de différence de piqué ou de couleur sur Jupiter. Peut-être qu’un meilleur observateur que moi avec un ciel plus stable utilisant un plus fort grossissement aurait remarqué quelque chose, mais moi je n’ai rien vu. Par rapport à mes conditions d’observations et mes aptitudes, ces oculaires ne vont donc pas limiter la performance de ma lunette.

La chose qui m’a le plus impressionné est la définition de l’image. Avec la 7 mm, qui donne un grossissement de 129X avec la TSA 120, j’au pu voir de manière très bien définie, le petit disque de Neptune. Je n’avais jamais pensé que c’était possible au-dessous de 200X ! La qualité de la lunette n’y est pas pour rien, mais l’oculaire n’a pas dégradé cette qualité. Ce soir-là, utiliser un plus fort grossissement ne donnait pas une meilleure image en raison de la turbulence. Je n’avais pas les plössl ce soir-là pour comparer. Mais par le passé, j’ai déjà pu constater que les plössl donnait une image très légèrement mieux définie que les Nagler ou Meade UWA sur les planètes.

 

Sur la Lune (et le Soleil), oui mais….

Sur la Lune, les images impressionnantes même s’il y a de la distorsion angulaire en bord de champ comme sur la plupart des oculaires grand champ. Il est en effet impossible physiquement, de corriger l’astigmatisme, la courbure de champ ou l’orthoscopie simultanément sur l’intégralité d’un tel champ. Des compromis doivent être fait par le concepteur, et pour un usage astronomique le choix est vite fait : on va corriger au maximum l’astigmatisme et la courbure de champ, afin de conserver un piqué maximal en bord de champ, et on va sacrifier la correction de la distorsion. Il existe plusieurs sortes de distorsion, mais pour simplifier une ligne droite devient une courbe tout en restant bien nette. Ce n’est pas gênant en observation astronomique sauf pour celui qui voudrait faire des relevés précis mais dans ce cas il utilisera de préférence un oculaire orthoscopique. Pour la Lune et le Soleil, ce n’est qu’une question d’esthétique lorsque l’on veut les contempler en entier, mais pour cela on utilise de faibles grossissements, il y a alors de la marge par rapport au champ de l’oculaire et donc l’image n’est pas affectée. Les 17,5 et 14 mm ont une légère courbure de champ, en effet en bordure de champ la mise au point n’est pas la même qu’au centre du champ. Il se peut aussi qu’une partie de la courbure de champ provienne de la lunette. C’est passé inaperçu en ciel profond, mais çà se remarque sur le Soleil. Mais encore une fois, si on met le Soleil au centre du champ avec la TSA 120, on ne remarque rien. Le 14 mm montre aussi un léger chromatisme, visible sur le limbe du Soleil. Sur le limbe de la Lune, il est visible avec les autres oculaires, mais de manière très faible ou plus du tout, selon la position de l’œil. C’est un peu déroutant pour moi mais bien loin d’être inhabituel, la plupart des oculaires, et pas nécessairement les moins chers, ont un peu de chromatisme. Par contre, ce qu’on regrette, c’est que par nuits stables la série s’arrête à 5 mm !

Dans un tel cas, il n’y a pas le choix, à moins d’utiliser une autre sorte d’oculaire, il faut coupler les Nikon à une lentille de Barlow, ce qui fait perdre en partie les avantages de poids réduits et de compacité par rapport à la concurrence. Mais ce n’est pas tout! Avec le 7 mm muni d’une barlow, en observant la Lune pour la première fois je voyais 2 taches noires diffuses, qui tournaient simultanément avec l’oculaire. En enlevant la barlow, elles étaient à peines perceptibles mais du moment que je savais qu’elles sont là, je les voyais ! Une inspection avec une lampe puissante montrait qu’il s’agissait de 2 poussières ou débris à l’intérieur de l’oculaire. Sur la plupart des oculaires, c’est sans conséquences. Sauf que sur les Nikon NAV SW, la formule optique est différente. Le plan focal de l’oculaire se trouve à l’intérieur de l’oculaire, sur ou très près d’une lentille. Lors de la mise au point, la moindre poussière se verra donc sur l’image. Retour direct chez APM Telescopes, qui me l’échange sans discuter. Mais cela m’a coûté les frais de port aller. Le nouvel oculaire a également des débris à l’intérieur, mais dans une moindre mesure. Sur un fond clair en observation terrestre, ils sont visibles avec une barlow et quasiment pas sans barlow. Je décide donc de na pas demander un nouvel échange, car ça ne servira à rien vu que de toute évidence, Nikon n’est pas en mesure de produire un oculaire exempt de poussières. A noter que Nikon a développé une barlow 1,6X spéciale pour les Nikon NAV SW. Les résultats seraient-ils différents qu’avec une barlow normale ? Une vérification poussée en pointant la lunette sur un fond clair et en utilisant une barlow, montre que le 17,5 n’a pas de poussière visible, les 14 et 10 mm en ont mais dans une moindre mesure que le 7 mm. Quant au 5 mm, une poussière est visible sans barlow mais tout près du bord du champ. D’un point de vue pratique, sans utiliser de barlow, ce défaut n’est pas perceptible ou faiblement perceptible selon la position de l’oculaire, et uniquement sur la Lune et le Soleil. Mais c’est quand même bien dommage, surtout que ces oculaires sont supposés être étanches à l’humidité…et à la poussière ! Le 5 mm a été acquis en Décembre 2023, soit près d’un an après le 7 mm. Cela montre que que Nikon n’a pas corrigé le problème.

 

Conclusion

Mais quel dommage que le processus d’assemblage et le contrôle qualité de chez Nikon ne soient pas à la hauteur des qualités de leurs oculaires ! Un vrai gâchis ! Pourtant, avec d’excellentes performances optiques sur un champ de 70°, un relief d’œil généreux, un poids raisonnable et un prix dans la moyenne de la concurrence, il est l’oculaire que de nombreux observateurs attendaient !

 

Avantages

Excellentes luminosité, contraste et piqué

Bon confort d’observation

Poids et dimensions raisonnables

 

Inconvénients

Débris à l’intérieur potentiellement visibles sur la Lune et le Soleil

Pas de focales au-dessous de 5 mm

Pas d’importateur en Suisse

  • J'aime 3
  • Merci / Quelle qualité! 1
Posté

Merci pour ce test!

ce sont des oculaires pas si courants mais très reconnus!!

j’ai beaucoup aimé le 10mm sur un newton 400/1800 l’oculaire est très agréable et le rendu bien neutre :) 


leur inconvénient est aussi la taille un peu large pour être utilisé sur une tête binoculaire. 

  • J'aime 1
  • 1 mois plus tard...
Posté (modifié)

merci pour ce compte rendu sur les NIKON NAV.
j'ai été conquis par ces oculaires, utilisés aussi bien sur mon dobson artisanal  325 /f5, que le C8, que ma 125 APO altaïr ou encore la planète Killer Vixen 80 L.

ils passent "partout" !

j'ai depuis, la série complète ( première édition avec "plaque vissée" 5mm et 14 mm et dernière édition "sérigraphiée 7 mm, 10 mm et 17.5 mm).

revendu la Barlow Nikon EIC 1.6X , pour une Zeiss Abbé, sans conviction

j'ai un rituel,  les met régulièrement en concurrence avec mes Clavé, mes taka ortho, et oculaire de microscope Leica, ou Olympus...surtout en planétaire et en solaire H-alpa double stack ( SM 60 )

et je termine toujours la session par les Nikon, et à chaque fois c'est le même constat....globalement ils m'en donne plus avec un plus grand confort

ce qui qui permet de prolonger l'observation sur une nuit d'excellent seeing. ils sont véritablement excellents
Dans les forts grossissements ils ne sont pas parafocaux à 100%, un pouillème de retouche se fait ressentir, et dans de rares conditions sont très sensible à un manque d'étanchéité aux lumières parasites si elle n'est pas bloquée ( heureusement ils ont aussi un oeilleton en plus de la bonnette ) avec parfois apparition du reflet de l'oeil sur la lentille de surface, si mauvais placement.

c'est vrai qu'ils nécessitent  un "apprentissage" de placement d'oeil.

c'est donc les nikon que j'emporterai sur une ile deserte, et si il ne devait y en avoir qu'un ce serait le zoom Baader

8-24 mkIV qui finalement

fait une excellente moyenne et ne quitte pas le PO ,dans les rassemblement du club ou avec du public qui enchaîne le solaire h-alpha et le diurne

Modifié par eric83
  • J'aime 1
Posté

Merci pour ce retour. J’ai hésité à plusieurs reprise pour le 7 et le 14… peut-être que je devrais essayer un jour. Ils seraient certainement parfait pour ma 80ED.

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