Aller au contenu

Décohérence et chat de Schrödinger


Jeff Hawke

Messages recommandés

Posté

Vous passez à côté de la question. Le paradoxe ne résulte pas du fait que nous ne savons pas ce qui s'est passé dans la boîte fermée. Ni du fait que nous n'aurons la surprise du résultat qu'en l'ouvrant. Ni du fait qu'un phénomène quantique aléatoire puisse provoquer un évènement classique, si surprenant soit-il. Tout cela est absolument trivial.

 

Le paradoxe est dans le fait que l'équation de Schrödinger décrit les systèmes physiques, y compris, en principe, les chats, comme une superposition d'états plus ou moins probables, jusqu'à ce qu'une mesure physique vienne les réduire à un seul.

 

En choisissant bien ses paramètres, on pourrait, en principe, faire dire à l'équation (si elle était formalisable en pratique à ce niveau macroscopique) que les états ne sont que deux, et sont équiprobables et simultanés : Chat mort - Chat vivant. C'est évidemment difficile à admettre!

 

Mais puisque vous semblez avoir le goût des paradoxes, vous auriez pu citer l'interprétation d'Everett, pour qui, à chaque fois qu'un tel basculement quantique se présente, il se crée deux univers réels représentant chacun l'une des alternatives. Il y a donc autant d'univers réels que de possibles, donc une infinité, et l'état présent de notre conscience "nous situe" dans celui qui seul rend possible l'état présent de notre conscience...

 

Ah, la mécanique quantique!

  • Réponses 94
  • Créé
  • Dernière réponse
Posté
Vous passez à côté de la question.
Non, je ne pense pas, mais peut-être m'exprimé-je avec insuffisamment de clarté, ou bien vous ne me lisez pas...;)

 

Le paradoxe ne résulte pas du fait que nous ne savons pas ce qui s'est passé dans la boîte fermée. Ni du fait que nous n'aurons la surprise du résultat qu'en l'ouvrant.
C'est clair. Le paradoxe vient de que l'état de l'atome n'est pas déterminé.

 

Ni du fait qu'un phénomène quantique aléatoire puisse provoquer un évènement classique, si surprenant soit-il.
Non, ce n'est pas ça. Ce n'est pas la question que l'événement quantique soit aléatoire, mais bien qu'il soit indéterminé (avant la mesure). Et que cette indétermination soit, avec l'expérience imaginée par Erwin Schrödinger, propagée au classique chat.

 

Il n'y a pas besoin d'imaginer un état de superposition des molécules du chat pour mettre au jour le paradoxe, et Schrödinger (que vous semblez quelque peu sous-estimer ;)) n'évoque pas cela. Le seul état d'indétermination de l'atome suffit à poser le problème.

 

Mais puisque vous semblez avoir le goût des paradoxes, vous auriez pu citer l'interprétation d'Everett

J'en ai parlé un peu plus haut, sans mentionner le nom d'Everett. ;)

 

Et je n'ai pas de goût particulier pour les paradoxes. :-_-:

Posté

Vous avez cité aussi la "gomme quantique" (j'ignorais cette expression).

 

Elle me semble consubstantielle à la mécanique quantique, et est au coeur du concept d'ordinateur quantique. Tant que des Qubits sont isolés, ils peuvent traduire les différents états de calculs simultanés, qui font et défont des résultats, donc gomment éventuellement, indéfiniment, jusqu'à la mesure du résultat final...

Posté

Ok, pas aléatoire, indéterminé. Je me suis mal exprimé.

Ok, l'indétermination est en soi un problème conceptuel dès la première propriété physique indéterminée. Mais ce n'est pas un paradoxe. C'est un problème conceptuel.

 

Le paradoxe est constitué par l'état simultané vivant et mort du chat, qui est très explicite dans la proposition de Schrödinger. Un chat à la fois vivant et mort n'est pas classique. Ce n'est pas un évènement classique mis en aval d'un phénomène quantique pour frapper l'esprit, c'est plus profond. C'est l'illustration, par Schrödinger lui-même, de l'étrangeté du monde que décrit son équation.

Et que cette indétermination soit, avec l'expérience imaginée par Erwin Schrödinger, propagée au classique chat.

Je crois que c'est là que gît le malentendu. Je maintiens que l'expression "propagée au classique chat" n'a pas de sens, à cause du mot classique. La propagation de l'indétermination en fait un chat quantique, qui fait partie d'un système indéterminé, justiciable, en principe, d'une équation de Schrödinger qui en décrirait les probabilités d'état.

 

L'équation de Schrödinger rend compte des probabilités d'état d'un système physique donné, sans préciser s'il s'agit d'un système "élémentaire" ou constitué de sous-systèmes plus fondamentaux. (Heureusement : On serait bien en peine d'affirmer que l'on a trouvé le système vraiment fondamental, celui dont l'indétermination conditionne toutes les autres!) En principe, l'équation peut donc s'appliquer à tout système physique. En pratique, on ne sait la formuler et la résoudre que pour des systèmes très simples, et même le cas d'un seul atome à plus d'un nucléon pose des problèmes insolubles...

 

Donc, comme toujours en physique, la délimitation du système considéré est essentielle.

 

Notre chat est classique pour lui-même, je suppose, et il peut, en bon physicien qu'il est, observer un système encore indéterminé, isolé de tout échange d'information, constitué d'un atome radioactif et d'un mécanisme cassant une fiole de poison. Le chat considère que la fiole de poison partage l'état d'indétermination quantique de l'atome, et qu'une même équation de Schrödinger rend compte de l'ensemble de ce système. La fiole est donc, pour le chat, en même temps cassée, et pas cassée. Certes, une mesure de ce système par le chat peut, à une chance sur deux, conduire à sa mort. Mais pas tant qu'il n'a pas fait la mesure, et donc rompu l'isolement du système mortel. En attendant, c'est un chat suicidaire peut-être, mais tout à fait classique, c'est à dire soit vivant, soit mort, pas les deux en même temps. Il est dans la même situation logique que le physicien que j'évoquais plus haut, qui dit "Je n'ai pas encore fait la mesure". Il n'y a pas de paradoxe pour le chat-physicien, classique, mais il y en a un pour la fiole, quantique.

 

Imaginons maintenant, comme le fait Schrödinger, que vous, physicien sadique, enfermiez le chat, en compagnie de l'ensemble précédent, dans une boîte parfaitement isolée de tout échange avec quoi que ce soit. Ce n'est plus le même système. Vous pouvez dire que l'indétermination s'est propagée au chat, mais plus qu'il est resté classique. Vous devez considérer que l'équation de Schrödinger pertinente est celle qui décrit tout le système indéterminé, le chat compris. Et l'équation dit (dirait, plutôt, si elle était formalisable) qu'il est à la fois vivant et mort, ces deux états étant équiprobables. C'est là le paradoxe. On peut dire que ce paradoxe était déjà dans la fiole cassé/pas cassée, et en ouvrant les poupées russes logiques, dans l'indétermination initiale de l'atome radioactif, je suis d'accord! Mais en considérant que seul le phénomène initial relève de l'indétermination quantique, tout ce qui est en aval restant classique, on passe, à mon avis, à côté de l'essentiel de ce sur quoi Schrödinger voulait attirer l'attention.

 

Vous observerez que le chemin logique que je décris entre les systèmes est aussi celui de la décohérence...

 

Armé de ce concept de décohérence, on n'est plus dans la même aporie :

 

On peut sans doute isoler un atome radioactif (et encore, mais bon...) et considérer qu'il est dans deux états superposés équiprobables Désintégré / Pas désintégré. D'accord, ça semble en soi paradoxal et inconcevable, mais ça se passe à une échelle dont le seul moyen d'accès est précisément la mécanique quantique. Il serait donc illogique et incohérent de prétendre imposer à ce monde quantique les catégories philosophiques que nous avons formées à la suite de notre évolution biologique et culturelle, à l'échelle macroscopique, à laquelle nous accédons plus directement par nos sens.

 

Si donc cet atome aux états superposés est mesuré par un détecteur macroscopique, le nouveau système intriqué, intégrant le détecteur, ne sera certainement plus isolé de l'environnement, et cet environnement lui imposera, ipso facto, une mesure immédiate qui réduira le paquet d'onde du système résultant. Les conditions de l'expérience de pensée de Schrödinger - PAS D'ECHANGE D'INFORMATION - ne sont donc plus respectées, et l'on est revenu dans un monde classique. Si un chat en meurt, ce sera à la suite d'une chaine causale classique, qui ne relève pas des conditions de l'expérience - de pensée - du grand Schrödinger.

 

On peut continuer à discuter sur un hypothétique délai lié à la propagation de la décohérence, mais ça n'est pas conceptuellement très significatif, selon moi.

 

La mécanique quantique reste très étrange et contre-intuitive, mais en dépit de ce que vous suggérez, il y a quand même des petits progrès conceptuels.

Posté
Ok, l'indétermination est en soi un problème conceptuel dès la première propriété physique indéterminée. Mais ce n'est pas un paradoxe. C'est un problème conceptuel.
Oui, que l'expérience de Schrödinger fait apparaitre en paradoxe.

 

Cela dit, c'est un sacré problème conceptuel de chez conceptuel, quand même. :be:

 

Un chat à la fois vivant et mort n'est pas classique. Ce n'est pas un évènement classique mis en aval d'un phénomène quantique pour frapper l'esprit, c'est plus profond. C'est l'illustration, par Schrödinger lui-même, de l'étrangeté du monde que décrit son équation.

On ne se comprend pas. Schrödinger ne croit pas à l'étrangeté quantique, et il monte ce paradoxe (de connivence avec Einstein) pour montrer que cette histoire d'indétermination c'est rien que des c...

 

Comme Bell, qui a fourbi son théorème pour mettre la quantique en défaut. Raté. ;)

 

Mais en considérant que seul le phénomène initial relève de l'indétermination quantique, tout ce qui est en aval restant classique, on passe, à mon avis, à côté de l'essentiel de ce sur quoi Schrödinger voulait attirer l'attention.

Justement, la façon d'attirer l'attention de Schrödinger, c'est de faire surgir la bizarrerie quantique dans le monde classique (aux fins de réfuter la bizarreire quantique, je le rappelle. Schrödinger est un classique. :refl:).

 

Vous observerez que le chemin logique que je décris entre les systèmes est aussi celui de la décohérence...

Oui. ;) C'est justement ce passage du quantique au (chat) classique.

 

Armé de ce concept de décohérence, on n'est plus dans la même aporie :

Je ne trouve pas que c'est un concept. Ca ressemble plutôt à un bricolage.

 

C'en est un, d'ailleurs, qui s'appuie sur la (discutable) équation de Schrödinger, justement).

 

On peut continuer à discuter sur un hypothétique délai lié à la propagation de la décohérence, mais ça n'est pas conceptuellement très significatif, selon moi.

Pour moi, ça l'est ! Une fraction ridicule de milliardièmes de secondes, c'est plus proche d'une année ou d'un siècle que de zéro. ;)

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

  • En ligne récemment   0 membre est en ligne

    • Aucun utilisateur enregistré regarde cette page.
×
×
  • Créer...

Information importante

Nous avons placé des cookies sur votre appareil pour aider à améliorer ce site. Vous pouvez choisir d’ajuster vos paramètres de cookie, sinon nous supposerons que vous êtes d’accord pour continuer.