Bonjour,
Je vous soumets mon bref compte-rendu sur un téléscope 150/750 dont on parle un peu moins mais qui pourrait intéresser des amateurs ou des curieux du ciel qui souhaitent s’y mettre avec un budget entre 300.- et 400.-: le Newton TAL 150/750.
TAL - petit résumé ...
Suivant mes lectures, TAL est une marque de la manufacture d’instruments de Novosibirsk qui a été fondée en 1905 en vue de la confection d’instruments optiques de visée pour fusils et pièces d’artillerie destinés à l’armée impériale du tsar.
Ce n’est qu’après la seconde guerre mondiale qu’ils ont débuté la fabrication d’instruments optiques pour le civil.
La fabrication de téléscopes par TAL est dite remonter aux années 1980 sous l’impulsion d’un russe, Leonid Leonidovich SIKORUK, directeur de films, amateur astronome, astrophotographe et constructeur de téléscopes au sein du club "Dmitriy Maksutov".
SIKORUK est aussi connu pour avoir donné son nom à un planétoïde découvert en 1995, 8561 Sikoruk (1995 SO25).
Le premier TAL a été un Newton d’un diamètre de 65mm.
TAL propose des téléscopes Newton jusqu’à 150mm, Klevtsov-Cassegrain (Maksutov-Cassegrain modifiés) jusqu’à 250mm et des lunettes achromatiques et apochromatiques de 100mm et plus.
Pour plus d’informations:
Résumé historique du téléscope d’amateur en Russie:
http://www.telescopes.ru/articles/article2.phtml
Sur NPZ:
Caractéristiques, accessoires livrés de série, montage, descriptifs:
Diamètre: 150mm
Focale: 750mm
miroir: parabolique
Porte-oculaire: à crémaillière, sans démultiplication,
coulant 50.8mm avec adaptateur 31.75mm fourni
Chercheur: 9x50, visée droite
Poids du tube seul: 7,4 kg
Poids de la colonne (avec pieds): 7,4 kg
Poids d’un contre-poids : 2,4kg (2 livrés de série)
Poids de l’ensemble monté: +/- 25kg
Poids de la monture: 4 kg
Latitudes d’utilisation: 0° - 70°
Dans le temps, TAL livrait certains de ses instruments dans des caissons en bois.
Au vu du prix de vente de ce modèle-ci, il ne fallait pas demander la lune. L’emballage en carton est néanmoins très bien rembourré avec moules en stéropor d’un autre âge pour protéger le tout. Détail pittoresque et sympathique, les inscriptions cyrilliques sur l’un des cartons.
Il y a deux cartons, l’un pour la colonne, ses pieds et sa monture avec contre-poids, l’autre pour l’instrument, les accessoires et la notice (en anglais).
La monture est une équatoriale simple, sans possibilité d’installer un viseur polaire ou un moteur (TAL offre des montures plus évoluées).
Les cercles gradués sont de taille généreuse et bien lisibles. Souvent, ce genre de cercles est critiqué pour manquer de précision: j’ai constaté qu’en utilisant une loupe éclairante rouge tamisée pour grossir les graduations, on peut gagner en précision de pointage.
Détail appréciable: la notice contient un «acceptance certificate», une sorte de certificat de contrôle de qualité indiquant le numéro de série et signé mais sans test optique (comme les mesures PTV, RMS, Strehl et autre).
En outre, la notice comporte un tableau avec les coordonnées équatoriales des étoiles simples et doubles majeures dans l’hémisphère Nord.
Une petit carton accompagne l’instrument et indique la date de fabrication.
Ca peut paraître «vieux jeu» mais moi, j’adore ce genre de petits soins et d’attentions portés à la fabrication et à la livraison d’un instrument.
Dans les accessoires figurent deux oculaires dits «Super Plössl» de 25mm et de 7,5mm.
Ils sont d’excellente facture et en visuel, j’ai l’impression qu’ils livrent tout ce qu’un Plössl de qualité peut livrer.
On trouve aussi une Barlow x2, construite comme un «char d’assaut» munie d’un capuchon côté oculaire (j’ai ajouté un deuxième capuchon pour le côté «lentille»), avec petite vis de compression sans anneau de serrage en laiton. Sa qualité optique ne laisse rien à désirer et est à des mondes des Barlows basiques livrées avec des instruments d’autres fabricants.
Le chercheur optique (à visée droite et réticule en croix standard) est un bijou: solide, il est équipé d’un pare-buée amovible et d’une mise au point hélicoïdale à l’oculaire.
Il est muni de deux colliers de fixation distancés et rainurés de façon à ce que les vis de serrage dans les deux anneaux de sa base n’entrent pas en contact direct avec son revêtement laqué blanc. Bien pensé.
Il n’est pas éclairé mais un petit cache dévissable suggère qu’on pourrait y loger un dispositif d’éclairage rouge du réticule.
L’embase est plus que généreuse et n’a rien à voir avec les embases un peu chiches de modèles concurrents. Pour clôturer le tout, l’embase comporte deux petites vis de calage: de cette façon, une fois installé, le chercheur et sa fixation ne peuvent en aucune manière glisser ou tomber, même si la vis de serrage latérale du pied venait à se disloquer.
La qualité optique de ce chercheur est très convaincante: le revêtement bleuâtre de la lentille suggère une traitement optique peut-être moins sophistiqué, mais un traitement quand même.
TAL va encore plus loin et livre de série un réticule bien solide et dévissable pour placer dans les jupes des oculaires fournis (à ne pas mettre dans des oculaires dont la jupe n’est pas assez profonde ou qui n’est pas pourvue de filetage approprié). Ce réticule sert à l’alignement précis du téléscope avec le chercheur; l’usage de l’oculaire de 25mm suffit.
Sont encore fournis deux adaptateurs en métal et de bonne facture, l’un à la norme M42 et l’autre pour une bague T2. Je n’en ai eu aucun usage jusqu’à maintenant.
En fin de compte, TAL livre un écran de projection pour observer les taches solaires en lumière blanche qu’on fixe sur la tige de contre-poids; il faut tourner le tube de façon à ce que l’écran et le porte-oculaire soient face-à-face.
Je reste étonné car convaincu qu’il est hautement déconseillé d’exposer les miroirs primaire et secondaire au soleil sans l’interposition d’un filtre genre Astrosolar de Baader à l’entrée du tube, mais suivant les explications que j’ai reçues, le diamètre limité à 150 mm du téléscope ne rend pas cette opération dangereuse sans filtrage.
Ceci étant, j’éviterai quand même et je n’utiliserai pas cet écran de projection. Un filtre du genre feuille Astrosolar correctement installé sur l’entrée du tube me semble préférable et plus sûr.
Le montage est très simple et très rapide. L’impression de robustesse qui se dégage de toutes les pièces encourage d’y aller sans hésitations, sans craintes: c’est appréciable.
Attention: le miroir primaire n’est pas pourvu d’oeilleton central, mais Webastro regorge d’astuces pour en placer un (je pense notamment aux tutoriels de Gégé sur la collimation).
L’état de la collimation à la livraison m’a semblé bon à en juger les images d’étoiles défocalisées. Conclusion: pas touche!
Seul le secondaire m’a semblé un chouïa de traviole, mais je ne dispose que d’un oeillet de collimation «maison».
Comme indiqué, j’ai collé un oeilleton central sur le primaire.
Le miroir secondaire est monté de façon classique et comporte une vis centrale et trois vis périphériques pour son réglage. Cet assemblage est recouvert par un couvercle vissant en métal - encore un petit détail non seulement soigneux mais aussi protecteur de toute la fixation du secondaire.
Petit souci: les branches controlatérales de l’araignée ne sont pas parfaitement alignées entre elles, ce qui pourrait provoquer des aigrettes un peu bizarres: je n’ai toutefois pas encore remarqué d’aigrettes dédoublées.
Le miroir primaire repose sur un support classique, il est tenu par trois brides qu’on peut serrer plus ou moins fort.
Les vis de blocage classiques manquent mais une molette centrale sur le support du miroir primaire permet de «plaquer» le primaire contre ses brides.
Autre détail intéressant: l’espace entre la paroi interne du tube et le bord du miroir primaire n’est pas hermétiquement clos: un interstice d’un petit travers de doigt permet à l’air de circuler et, pendant la phase d’acclimatation, de remonter le tube dressé à la verticale: à mon avis, cela permet d’accélérer un peu la mise en température du miroir primaire.
Petit inconvénient: des sources accidentelles de lumière derrière le tube peuvent être gênantes pour les observations, mais il n’y a plus qu’à refermer l’arrière du tube moyennant l’un des deux caches en plastique fournis de série.
La monture mérite quelques commentaires.
La colonne sur trois pieds est bien stable mais plutôt destinée à des sols plats qu’à des sols accidentés sur lesquels un trépied classique reste plus à l’aise.
La monture sur colonne est bien stable aussi et absorbe assez rapidement les vibrations engendrées par les contacts ou les manipulations de l’instrument: je compte entre 3 et 4 secondes. Pour ma part, c’est très correct.
Une grosse poignée très solide permet de desserrer et de resserrer le réglage d’altitude.
Les molettes de réglage fin en déclinaison et en ascension droite n’ont pas de course sans fin, mais seulement une amplitude de -4° / +4° par rapport à la position «médiane»: ceci implique qu’une fois en bout de course, il faut «rebobiner» vers l’arrière, repositionner le tube moyennant desserrage/resserrage des vis en AD ou DEC, puis repartir avec les molettes de réglage fin etc.: c’est un petit inconvénient qui ne me paraît pas dramatique et auquel on s’habitue assez vite.
Le porte-oculaire:
Il est à crémaillère simple, non démultipliée et en coulant 50.8mm avec un adaptateur pour le coulant 31.75mm, sans anneaux de compression en laiton.
Il est costaud mais rustique et il ne faut pas hésiter à jouer sur les petites vis de serrage à sa base ou sur un graissage adéquat pour améliorer sa fluidité. Il manque un peu de douceur, de fluidité, mais en fin de compte je n’éprouve pas de difficultés pour trouve une mise au point adéquate.
Sur mon exemplaire: les colliers du tube étaient un peu surdimensionnés: rien de grave, mais cela faisait que suivant l’inclinaison du tube, celui-ci avait tendance à glisser vers l’arrière: le collage de quelques pastilles en feutre épais de 2-3mm d’épaisseur dans les colliers a vite remédié à ce problème.
Essais sur le ciel
Planètes:
Seule Jupiter a pu faire l’objet de quelques observations: ce TAL démontre si besoin était qu’un téléscope de 150/750 reste un instrument tout à fait agréable à utiliser en planétaire: les vues sont nettes, les lunes et les quelques détails de surface (bandes nuageuses et structures majeures accessibles) suffisamment piqués pour bien apprécier le planétaire.
Lune:
Les observations sont magnifiques.
Le pouvoir de résolution de 150mm de diamètre et les vues nettes et agréablement piquées par rapport à mes attentes sur des détails résolus et des ombres et lumières témoignent d’une qualité optique très satisfaisante.
Quelques objets phares du ciel profond:
Bien entendu, ce téléscope montrera ce que sera capable de montrer un instrument de 150mm de diamètre. Mais il le fera dans des conditions qui m’ont plu énormément à en juger les observations que j’ai pu faire sur quelques galaxies phares, amas globulaires ou ouverts ou nébuleuses ...
Pour la petite histoire, deux bons souvenirs parmi d’autres avec ce téléscope installé sur mon balcon citadin: M76 et la dernière supernova dans M82.
A mon goût, ce téléscope n’est pas gourmand en oculaires très chers et il faudrait être assez pointilleux pour ne plus apprécier les vues procurées avec des oculaires à prix raisonnables comme p. ex. les HRII planetarys.
Impressions au final:
Ce téléscope est livré complet à l’usage et on peut s’attaquer à tout type d’objet standard sous réserve de la qualité de son ciel et des limites inhérentes à un diamètre de 150mm.
On a l’impression de travailler avec du solide, suffisamment compact pour rester encore aisément transportable et de bonne qualité tant mécanique qu’optique ... le tout pour un prix qui me semble très raisonnable et calculé au plus juste. A souligner la très bonne qualité des accessoires fournis, dont les oculaires et la Barlow.
Ses quelques défauts tiennent du détail infime ou insignifiant et ne devraient pas nuire à son bilan largement positif pour ma part.
J’aime beaucoup et me réjouis déjà pour la prochaine sortie avec cet instrument :).
Bon ciel à tous.